À égalité, Ding Liren sert pour le match dans la dernière partie contre Gukesh

À quoi ça tient une partie, pour ne pas dire pratiquement un match, sinon à presque rien. Après la treizième partie, Ding Liren a avoué en conférence de presse qu'il était sur le point d'abandonner quand il s'est rendu compte que le coup qu'il avait prévu, 31...♖c7, se heurtait à 32.♘f6+! et 1-0. Et puis, finalement, malgré très peu de temps à la pendule, il a trouvé la belle et unique ressource 31...♖f8!, que Gukesh a qualifié de surprise désagréable.

Sur la possibilité de prendre sa retraite après ce match, le Champion du Monde a déclaré : « Je pense que je vais continuer ma carrière, mais peut-être jouer des tournois moins importants, plutôt en rapides et blitz qu'en classiques ».

Gukesh D : « Vishy Anand a été une source d'inspiration et un modèle pour moi et des millions d'autres, et je serais heureux de jouer au même niveau que lui pendant de nombreuses années. »

Gukesh D : « Il est approprié [fitting] que le match se poursuive jusqu'à la dernière partie, car nous avons tous deux fait preuve de beaucoup d'esprit combatif et joué des échecs très divertissants ! »

Gukesh D : « Plus le match est serré, plus il devient excitant. Mais bien sûr, demain [aujourd'hui] c'est une partie importante et je vais essayer de faire de mon mieux. »

À une question sur son état d'esprit après la partie d'hier, Ding Liren a dit : « Je dois décider quelle sera la stratégie pour la prochaine partie ; une partie en or ! » Avant d'ajouter un peu plus tard : « Je ne pense pas que vous verrez une nulle rapide ».

On dit souvent que les Français, en bons romantiques que nous sommes, aimons les « perdants magnifiques ». Raymond Poulidor, le match perdu par Saint-Etienne contre le Bayern de Munich en 1976, à cause des fameux « poteaux carrés », le France-Allemagne 1982 perdu à l'issue des tirs au but, sont en effet gravés dans nos mémoires. Mais ce que nous aimons encore plus, c'est voir l'outsider triompher du favori. Nous adorons voir et revoir David l'emporter sur Goliath. Et avant cette quatorzième et dernière partie classique, nous avons un Ding Liren mille fois enterré, qui sans avoir été un seul instant coruscant, sinon manqué plus d'une fois de basculer dans l'abîme, s'apprête à lancer une dernière pierre sur le héros des Indiens ; le « bogosse » Dommaraju Gukesh !

En cas de partie nulle dans la dernière partie classique du match, un départage est prévu vendredi 13 décembre à partir de 10 h 00.

Quatre parties à la cadence de 15 minutes + 10 secondes par coup. Si le score est à égalité, un match en deux parties à la cadence de 10 minutes + 5 secondes. Si le score est toujours à égalité, un match en deux parties à la cadence de 3 minutes + 2 secondes. Si le score est toujours à égalité, une seule partie à la cadence de 3 minutes + 2 secondes. Si l'égalité persiste, une autre partie à la cadence de 3 minutes + 2 secondes par coup. Si encore et toujours égalité, la procédure sera reproduite jusqu'à obtenir un résultat décisif.

Sur le papier, un départage avantagerait Ding Liren, puisque ses classements sont de 2776 Elo en rapide et 2785 en blitz, alors que Gukesh ne possède que 2654 en rapide et 2615 en blitz. Et surtout, en 2023, sa victoire au départage face à Ian Nepomniachtchi. Le Russe avait reconnu : « J'ai eu de nombreuses positions prometteuses. J'aurais dû essayer de terminer en classique, car c'était juste une question d'un ou deux coups précis. » L'histoire va-t-elle se répéter ?

Partie n° 14 : Ding Liren - Gukesh D

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Après sa victoire dans la onzième partie, Gukesh, croyant sans doute son adversaire au bord du gouffre, a commis une grave faute psychologique dans la douzième en imaginant qu'il suffisait d'attendre une faute de Ding pour voir le point lui choir dans les mains comme un fruit mûr.

Contrairement à ce qu'ont pu en dire certains commentateurs, en particulier en langue anglaise, la partie n'a pas été d'un très haut niveau et certainement pas "great", "amazing", et encore moins "fascinating". L'affrontement n'a été remarquable qu'en raison des circonstances où Ding Liren, après avoir reçu un terrible uppercut dans le round précédent, s'est courageusement relevé tel un Rocky Balboa.

Comme l'a souligné Magnus Carlsen dans son recap', Gukesh n'a exercé aucune pression dans l'ouverture et a laissé toute latitude au Champion du Monde de poser son jeu et manœuvrer à sa guise. Le numéro un mondial a même laissé entendre que Ding Liren n'avait sans doute pas eu besoin de calculer la moindre variante de toute la partie, si ce n'est le 39.♖xg7+! qui a forcé l'abandon. Cependant, toujours selon le Norvégien, après sa victoire et l'égalisation, Ding Liren a repris confiance et toute la pression se retrouve maintenant sur les épaules de Gukesh dans sa dernière partie classique avec l'avantage des pièces blanches.

La victoire de Ding Liren dans la douzième partie, rétablissant immédiatement l'égalité après avoir souffert d'une terrible défaite dans la onzième, a évidemment complètement rebattu les cartes de ce Championnat du Monde d'Échecs. Comme l'a très bien dit Peter Heine Nielsen : « Le problème avec les prédictions sur le match Ding vs Gukesh, c'est qu'elles ont tendance à paraître plutôt ridicules 24 heures après. »

Romain Edouard après la douzième partie : « Tout s'est passé en faveur de Ding. D'abord, avec une pression moindre, il a semblé jouer sans crainte. Après quoi, il a probablement commencé à croire/comprendre qu'il pouvait gagner. Gukesh a joué un type de position connu pour être inférieur - c'est du moins ce que j'en sais, donc je suppose que beaucoup le savent aussi - où il n'a trouvé aucun moyen de s'exprimer. Je parie toujours sur Gukesh, même si maintenant n'importe lequel des deux peut s'effondrer à tout moment ! »

Ce que l'on sait avec certitude c'est que Ding Liren est un stratège. Il n'y a qu'à voir le ballet orchestré par sa Dame dans la douzième partie : 14.♕c2 ; 17.♕d2 ; 20.♕c3 ; 21.♕c2 ; 25.♕c3... Lors de ses analyses dans les conférences de presse, le plus souvent il parle d'un Cavalier mal placé, d'un Fou hors-jeu, d'un manque d'espace, etc., rarement d'une combinaison. Ses capacités tactiques semblent d'ailleurs un ton en dessous de sa vision stratégique. Par exemple, à la question : Pourquoi n'avez-vous pas tout simplement gagné la qualité ? La réponse de Ding Liren a surpris tout le monde : « La raison est simple : je n'ai pas vu 26.♘a7 », alors que tous ceux qui suivaient la partie n'ont vu que ça.

On connait aussi maintenant les secrets de Ding Liren pour renaître : « J'ai pris une tasse de café avant la partie, ce qui m'a aidé à me sentir beaucoup plus énergique ! » — « Ma mère aussi m'a donné confiance. Elle m'a dit que j'avais réussi à le faire la dernière fois [face à Ian Nepomniachtchi en 2023] et que je pouvais le refaire. »

Quelle ouverture Gukesh va-t-il choisir pour cette treizième partie ? On pourrait imaginer 1.e4, mais Ding n'a aucune obligation de rejouer la défense Française et pourrait répondre par 1...e5. Il faudrait donc avoir quelque chose de spécial à proposer sur l'Italienne, l'Espagnole et la Petrov. Ou alors jouer 1.e4 e5 2.♗c4!? pour éviter la défense Russe. Il faut plutôt envisager un début fermé avec 1.d4 voire 1.♘f3. Et il reste encore une question : le Challenger doit-il jouer pour le gain à tout prix ou se contenter d'une partie nulle et viser le départage ?

Partie n° 13 : Gukesh D - Ding Liren

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« Gaspiller son temps de réflexion est une erreur aussi grave que de laisser une pièce en prise. » disait déjà Alexandre Alekhine (1892-1946).

Plus proche de nous, Vasyl Ivanchuk : « Voici mon adversaire plongé dans ses pensées depuis plus de 20 minutes. Qu'est-ce qu'il regarde ? Je ne sais pas, mais peut-être veut-il trouver quelque chose de spécial. D'un point de vue créatif, une telle approche devrait être saluée, mais d'un point de vu sportif, ce serait peu probable. Personne ne peut contester, et à juste titre, les avantages d'une gestion du temps économique dans l'ouverture ».

Certains temps de réflexion de la onzième partie ont rendu l'affrontement mémorable : 4...♘f6 après 38 minutes et 17 secondes ; 5...♗g4 après 22 minutes et 13 secondes et 11.g3 après 1 heure de réflexion ! Avec une énorme pression de la pendule sur les épaules des joueurs aux alentours du 25e coup, un des deux belligérants allait certainement gaffer. Et ce qui devait arriver arriva, ce fut Ding, mais la pièce aurait très bien pu retomber sur l'autre côté.

« Ding Liren n'a désormais plus le loisir de "chill" (ne rien faire, se prélasser) maintenant. Il doit tout donner dans les trois dernières parties s'il veut conserver son titre ! » Susan Polgar

« Il y a un an, j'ai fait un come-back dans la 12e partie. Demain [aujourd'hui], j'essaierai certainement de le répéter. » Ding Liren.

La douzième partie avant le jour de repos du mardi 10 décembre s'annonce décisive. Toutefois, le fragile Ding Liren, qui jusqu'à maintenant n'a joué que timidement, est-il réellement en capacité, en seulement un nycthémère, de trouver les ressources suffisantes pour réagir avec autorité ? C'est la grande question à laquelle la douzième partie va apporter une réponse.

Une victoire de Dommaraju Gukesh, né le 29 mai 2006, serait pratiquement synonyme de titre mondial et permettrait de plus à l'Indien d'entrer dans l'histoire comme le plus jeune Champion du monde d'échecs, à 18 ans, 6 mois et une petite poignée de jours. Une partie nulle garderait quant à elle le suspense encore une partie ou deux. En revanche, une défaite de Gukesh envelopperait la fin de ce Championnat du monde dans un épais brouillard.

À noter qu'à ce jour, les plus jeunes Champions du monde sont : Ruslan Ponomariov, né le 11 octobre 1983, Champion du monde FIDE - en formule coupe, à élimination, ce qui fait que beaucoup ne le considèrent pas vraiment comme un Champion du monde - en 2002, à 18 ans et 8 mois. Garry Kasparov, né le 13 avril 1963, Champion du monde en 1985 à 21 ans et 8 mois. Et Magnus Carlsen, né le 30 novembre 1990, Champion du monde en 2013 à 22 ans et 11 mois.

Partie n° 12 : Ding Liren - Gukesh D

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Après la dixième partie, proche de la perfection ; 98 % de précision selon Stockfish 17 pour Ding, 99 % pour Gukesh, il n'y a rien à dire de plus que ce que nous avons écrit dans l'incipit de la dixième partie. Voici toutefois deux extraits de la conférence de presse d'après-partie :

À la question : Quelle est la chose la plus inattendue ou surprenante que vous ayez apprise sur vous-même lors de cet événement ? Ding Liren a remarqué : « Je suis toujours le premier à arriver ! » 

Sur le fait qu'il ne reste plus que quatre parties à jouer. Gukesh D : « Désormais, le coût d'une partie est plus élevé qu'avant, mais mon approche et mon objectif sont toujours les mêmes : jouer de bonnes parties. » — Ding Liren : « Il n'y a plus beaucoup de place pour faire des erreurs, chaque défaite entraînerait une très mauvaise situation. Nous devons être prudents à chaque coup. »

Avant la onzième partie, la question qui nous taraude est de savoir si Gukesh D va rejouer 1.e4, et Ding Liren une défense Française pour la troisième fois. Magnus Carlsen, dans son récap' de la neuvième partie, s'étonnait déjà que l'Indien ne rejoue pas 1.e4, sinon une Catalane dont le Chinois est un spécialiste.

La défaite dans la première partie avec la variante Steinitz aurait-elle traumatisé Gukesh ? L'Indien n'aurait-il rien de mieux que la variante d'échange dans sa giberne ? Le fait que le secondant de Ding, Richard Rapport, joue la Française, l'effraie-il à ce point ? Ou alors, Dommaraju Gukesh attend-il le dernier moment pour porter l'estocade avec une préparation mitonnée aux petits oignons sur « La partie du Pion du Roi un pas » et ainsi laisser le moins de chances possibles à son adversaire de revenir au score ?

Partie n° 11 : Gukesh D - Ding Liren

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« C'est une partie très difficile pour moi » a déclaré Ding Liren en conférence de presse. Le Champion du Monde a cependant clairement sous-estimé sa position, puisqu'il a jugé : « J'aurais dû jouer 15...e6 et la position n'est pas si mauvaise. Après 15...g6 mon Fou est complètement hors jeu [il a raté 16.a4] et je ne pense pas avoir de chance après ça ! » Alors qu'en fait ce n'est que dans les derniers coups, sous la pression de la pendule, que la position noire s'est effondrée.

« J'ai été surpris d'entendre Ding dire qu'il pensait être en difficulté après 15..g6, parce que je pensais que c'était moi qui étais en difficulté ! » Gukesh D

Gukesh D sur son choix d'ouverture dans la 11e partie : « Nous pensions avoir de bonnes chances de le surpasser en termes de préparation, et mon équipe a fait un travail incroyable sur cette ligne. J'ai regardé, j'ai trouvé qu'elle était très intéressante, et que le rapport risque/récompense était plutôt sympa parce que je le surprendrai à coup sûr. »

Gukesh D sur son 5.a3 : « C'est quelque chose que mon équipe avait préparé et m'a montré hier soir, mais ce qui s'est passé ensuite a été terrible pour moi ! »

« J'ai passé tellement de temps à élaborer ce plan stupide. » Gukesh D à propos de sa position après 15.♖d1. « Cette partie aurait pu facilement tourner dans l'autre sens. C'est une partie très importante, mais il en reste encore trois très importantes à jouer ! »

« Pendant la partie j'ai perdu mon sang-froid à un moment donné. J'avais obtenu exactement ce que je voulais dans l'ouverture et ensuite je suis devenu fou pendant un certain temps. J’essayais simplement de jouer un coup à la fois qui ne perdait pas immédiatement. Puis j’ai trouvé ce 16.a4 qui m’a donné une ressource très importante. Après ça j'ai réalisé que je n'étais pas perdant et que j'avais même des chances. Et puis, soudainement, j'ai gagné la partie.» Gukesh D

Lors de la conférence de presse de la neuvième partie du match, Ding Liren a déclaré ce qui semble être désormais une évidence : « Personne n'est clairement meilleur que l'autre dans ce match, ça va donc être difficile de gagner ! »

Il reste cinq parties à jouer et Ding Liren aura trois fois les Blancs. Quand on le lui a fait remarquer, Gukesh a plus ou moins donné la même réponse que lors de la troisième partie : « Je pense que de nos jours, avec toutes les lignes que l'ordinateur propose, il n'y a plus de grandes différences entre les Blancs et les Noirs. Les ordinateurs font marcher presque toutes les lignes qui étaient considérées comme douteuses avec les Noirs. Donc maintenant, c'est égal avec les deux couleurs. Je ne dirais donc pas que c'est un énorme avantage. » Avant d'ajouter : « Lors des dernières parties j'ai réussi à jouer de très bons échecs. Pour moi, l'essentiel est de continuer avec la même énergie, de jouer au même niveau et de m'améliorer un peu dans les moments critiques. »

Ding Liren à propos des commentaires sur les réseaux sociaux : « J'ai vu [des commentaires] disant que je sous-estimais toujours ma position et que mon adversaire surestimait toujours la sienne. J'ai aussi vu quelqu'un dire que je faisais toujours match nul, même quand j'étais mieux. Cela ne m'affecte pas je pense. »

À la question de Charlize (FIDE Social Media) — Il y a-t-il une différence psychologique à l'approche des cinq dernières parties ? Gukesh a répondu : « C'est toujours la même approche. On y va et on essaie de bien jouer aux échecs. » Ding Liren a dit : « En général, la stratégie est la même que lors de la première partie, car ce n'est pas comme si c'était la dernière. Toutefois, les idées sont de moins en moins nombreuses car nous avons beaucoup essayé. C'est peut-être la principale différence ». Avant de conclure au sujet d'un possible départage : « La série de nulles peut être interrompue à tout moment ; il est donc encore trop tôt pour penser au départage. »

À la fin de sa vidéo récapitulative de la neuvième partie, le Maître FIDE Sylvain Ravot remarque fort justement que les critiques publiées sur Internet concernant le niveau de jeu de ce Championnat du Monde d'Échecs 2024 manquent d'objectivité.

En effet, si c'est pour dire que Ding Liren et Dommaraju Gukesh sont moins forts que Anatoly Karpov, Garry Kasparov, Vishy Anand ou Magnus Carlsen, merci, mais nous sommes déjà au courant !

Sylvain rappelle aussi que Ding Liren a traversé une sévère dépression, qui a débuté en 2020 pendant le Covid, qu'il a réussi à revenir petit à petit, jusqu'à remporter le titre mondial face à Ian Nepomniachtchi en 2023, avant de subir une rechute. D'ailleurs, pendant l'année 2024, avant ce Championnat du Monde, Ding Liren a encaissé pas moins de dix défaites pour seulement deux victoires ; face à Gukesh le 15 janvier au Tata Steel de Wijk aan Zee et contre Max Warmerdam le 27 janvier du même tournoi.

Quant à Dommaraju Gukesh, nous avons tendance à oublier qu'il n'a que 18 ans ! Kasparov en avait 21 en 1984 au moment de son premier match pour le titre mondial, et c'était considéré comme extrêmement précoce. Et enfin, Magnus Carlsen avait 23 ans en 2013 lors de son match contre Viswanathan Anand.

Emil Sutovsky, le directeur général de la FIDE : « Je trouve étrange toute cette histoire de « ils font trop d'erreurs ». Quant à la comparaison avec le passé. Kasparov contre Karpov était un match légendaire, mais vérifiez-le avec un moteur actuel... Je me souviens que Garry m'avait dit en 2002 à quel point la fameuse 16e partie du match de 1986 était mauvaise, selon les moteurs de l'époque. Imaginez avec ceux d'aujourd'hui. Que dire de Fischer vs Spassky 1972, à commencer par le 29...♗xh2 de la première partie, qui est en fait un coup normal selon les moteurs modernes, car ils parviennent à calculer jusqu'à 0.00. Le 21...♘f4 de Tal contre Botvinnik 1960 n'était qu'une gaffe, mais est-ce vraiment important ? »

Au public, assisté par des ordinateurs qui planent à des 3300 Elo, qui se permet d'appeler une faute un coup qui fait passer l'évaluation de +0.34 à -0,18, voici ce qu'en disait déjà Viswanathan Anand en 2013 : « Beaucoup de spectateurs n'ont plus aucune idée de ce qu'un joueur traverse sur un échiquier, parce qu'ils sont assis à regarder avec des logiciels d'analyse. Vous devriez vous asseoir à la table, transpirer et ressentir la peur de la défaite ou la proximité de la victoire pour comprendre ce qui se passe dans la tête d'un joueur... Si vous pensez que c'est facile, éteignez votre module et essayez de trouver quelques coups par vous-mêmes. »

Toujours est-il qu'avec des déclarations d'avant-match telles que : « Ça va être un massacre ! » d'Arjun Erigaisi ou encore : « Tous les signes indiquent une victoire claire et dominatrice de Gukesh. » d'Hikaru Nakamura, rares étaient ceux qui auraient imaginé un Ding Liren à égalité après neuf parties, et encore moins un tel déroulement.

Alors que Magnus Carlsen accordait jusqu'à 75 % de gain du match à Gukesh au début, dans son récap' « Take Take Take » après la neuvième partie, il a dit : « Gukesh n'est plus le favori de ce match. C'est 50/50 maintenant. » Le frêle Champion du Monde chinois Ding Liren, sur lequel pratiquement personne n'aurait misé un yuan avant le premier coup, oppose en effet une résistance inopinée au jeune Challenger indien Dommaraju Gukesh.

Partie n° 10 : Ding Liren - Gukesh D

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Les déclarations des joueurs après la huitième partie :

Gukesh D : « Mon équipe fait un excellent travail. Pas seulement « Gaju » [Grzegorz Gajewski], mais aussi d’autres membres de l’équipe. Nous avons réussi à le surprendre dans les ouvertures. Je voudrais remercier mon équipe et j’espère que d’autres idées intéressantes viendront. »

Ding Liren : « En effet, vu le temps que j'ai utilisé dans la phase d'ouverture, vous pouvez voir que j'ai été surpris par son choix d'ouverture. »

— Il n'y aucun doute, Gukesh est mieux préparé que Ding Liren avec seulement trois semaines de préparation. L'avantage de l'Indien dans les ouvertures est indéniable, même si ce n'est que dans la huitième partie que le challenger a réellement pu en tirer un avantage tangible ; à la pendule et sur l'échiquier.

Gukesh D est revenu sur son refus de prendre la nulle : « Dans la position où je n’ai pas répété, je ne pensais pas être en grand danger. Je pensais qu’avec son Roi faible et mon fort pion en b3 je devais continuer. Je pensais même que je pourrais avoir quelques chances de gain. Mais bon, c’était juste une mauvaise appréciation de la position. »

Ding Liren : « Il m'a encore surpassé, mais il a ensuite raté quelques détails importants et m'a laissé revenir dans la partie. »

— Durant les premières parties du match, c'est Ding Liren qui laissait filer ses positions avantageuses. En revanche, dans la septième et huitième, c'est Gukesh qui a gâché ses avantages. Le couperet semble toutefois se rapprocher de la gorge du Champion du Monde.

Au sujet de leur niveau de jeu et du déroulement du match : Ding Liren : « Récemment, chaque fois que je joue une partie, que ce soit en ligne ou sur l'échiquier, c'est une partie très tendue. Même quand je gagne, c'est avec une très petite marge, donc c'était ce à quoi je m'attendais. »

Gukesh D : « À part la première partie, dans les dernières mon jeu a été assez bon. Juste quelques moments où j'ai raté mes chances, mais dans l'ensemble je pense que je joue vraiment bien. Évidemment, il y a encore de la place pour s'améliorer, j'espère dans la prochaine partie. »

Avant le jour de repos du vendredi 6 décembre, l'Indien et son équipe, avec l'avantage des pièces blanches, ont encore certainement mitonné une préparation au Champion du Monde dans cette neuvième partie du match.

« Si vous voulez des échecs joués parfaitement, regardez le championnat du monde par ordinateur ».

Partie n° 9 : Gukesh D - Ding Liren

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Gukesh D : « La partie a été très précise. J’aurais pu avoir un petit avantage après 16.♗a5, je pense que 20.♕b5 était prématuré : j’aurais peut-être dû jouer 20.♘e5 avec un petit avantage, même si cela ne devrait pas être décisif » a expliqué Gukesh D. après la partie. « C’était basé sur un mauvais calcul : j’ai raté son idée défensive 21...♕a7 et 22...♖b8 ».

Ding Liren a pu neutraliser l’initiative et liquider jusqu’à une finale à égalité, dans laquelle il avait même un petit avantage. Il a regretté avoir raté une bonne occasion d’égaliser à la fin de l’ouverture : « Mon secondant m’a dit après la partie que j’aurais pu jouer 17…♘xc4 pour égaliser facilement. J’ai calculé la ligne mais j’ai raté 19…♘d7 ».

Pendant la septième partie, alors que les molosses cybernétiques affichaient un +2.50 en faveur de Gukesh, on a assisté à un véritable hallali sur les réseaux sociaux. Pour beaucoup, la partie était terminée, le point acquis, et c'est tout juste si le Challenger n'était pas déjà couronné Champion du Monde ! Il ne manquait plus qu'un « Stop the count ! » pour faire bonne mesure. Même Vladimir Kramnik avait lâché prise : « J'arrête de suivre le match de près et d'enregistrer des résumés. C'est triste humainement. J'espère que Ding retrouvera sa forme un jour et reviendra en force dans un avenir proche ». 

Finalement, la réalité a montré un tout autre visage. Même si Gukesh D a tenté de se consoler lors de la conférence de presse d'un : « Ce n'est jamais agréable de rater une position gagnante, mais je suis content d'avoir surpassé mon adversaire assez facilement dans l'ouverture », ce gain, effectivement raté, semble bien pire que l'ensemble des positions seulement favorables gâchées par Ding Liren.

« J’ai cru que c’était un échec total pendant la partie. J’avais l’impression d’être surclassé, mais comme souvent, ma position n’était peut-être pas si mauvaise. Je devrais avoir plus confiance dans mes positions », a déclaré Ding Liren lors de la conférence de presse.

Jusqu'à maintenant, il a été reproché à Ding Liren, et à juste titre, de se précipiter sur les variantes menant à l'égalité sans croire en ses chances, alors que l'on complimentait Gukesh sur ses prises de risque pour forcer son adversaire à jouer. Néanmoins, dans la septième partie, Gukesh a eu tout ce dont il pouvait rêver : Avantage dans l'ouverture, avantage dans le milieu de jeu, et avantage dans la finale ! Que lui fallait-il de plus pour gagner la partie ?

Le doute va-t-il s'insinuer dans l'esprit de Gukesh ? Ding Liren va-t-il enfin prendre ses chances au sérieux ? La huitième partie, avec le Champion du Monde aux commandes des pièces blanches, pourrait répondre à ces questions.

Partie n° 8 : Ding Liren - Gukesh D

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Un duel plus psychologique qu'échiquéen

Après la sixième partie, à une question posée lors de la conférence de presse : « Quel est le livre qui vous a le plus influencé ? » Ding Liren et Gukesh D ont donné la même réponse – « Game Changer » de Matthew Sadler et Natasha Regan, sur les stratégies révolutionnaires d'AlphaZero et les promesses de l'I.A.

Le système créé par DeepMind, nourri uniquement avec les règles du jeu d'échecs, a battu les moteurs les plus puissants dans un style brillant et risqué, sans jamais perdre une seule partie. Les professionnels comme les joueurs de club profitent aujourd'hui des découvertes d'AlphaZero dans la préparation des ouvertures, la mobilité des pièces, l'initiative, les techniques d'attaque, les sacrifices à long terme, etc.

Pour en revenir au jeu lui-même, malgré un score de parité après six parties, la principale question qui semble hanter la plupart des commentateurs est : Mais quand est-ce que Ding Liren va enfin s'effondrer ? Cependant, là, on est dans l'affect, pas dans l'analyse. Apparemment, la majorité a choisi son Champion et veut voir Gukesh l'emporter.

Ce qui est logique d'ailleurs. Les joueurs indiens ont le vent en poupe, l'Inde dépense beaucoup d'argent dans les échecs, les échecs sont bien plus populaires en Inde qu'en Chine, il faut donc absolument que Gukesh gagne ! Surtout que Gukesh est beau, il a de l'allure, s'exprime bien, maîtrise parfaitement ses nerfs, visuellement il en impose, aucun doute, ça ne peut être que lui l'élu !

Face à lui, évidemment, Ding Liren ne peut rivaliser sur aucun de ces points. Post dépressif, semblant souffrir le martyre sur l'échiquier, nerveux, la démarche mal assurée, s'exprimant avec difficulté, il ne renvoie pas du tout l'image tant désirée d'un Champion du Monde d'Échecs.

En revanche, si l'on se concentre uniquement sur les parties, jusqu'à présent c'est quand même le Chinois qui a obtenu les meilleures opportunités, et on est très loin du massacre annoncé avant le premier coup de ce Championnat du Monde. On ne peut d'un côté reprocher au Champion du Monde de ne pas parachever ses avantages, sans reprocher à Gukesh de se mettre volontairement dans les problèmes ou, comme on dit communément ; de parfois jouer à l'envers.

À voir si la septième partie du match fera pencher la balance d'un côté ou de l'autre. N'oublions pas qu'avec les Blancs, sur 1.e4 Gukesh a perdu la première partie et souffert dans la cinquième à cause de son trop agressif 17.g4?!, et sur 1.d4, il aurait pu se retrouver très mal sans ce malencontreux 18...♖h5?.

Partie n° 7 : Gukesh D - Ding Liren

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Ding Liren : « Aujourd'hui, je n'ai pas abandonné dans une situation pourtant très difficile ! » Son secondant, Ni Hua, lui a dit un peu plus tard : « Tu t'es sauvé la vie ! »

N'y allons pas par quatre chemins, dans la cinquième partie Ding Liren a laissé filer une occasion d'en faire voir de toutes les couleurs à son adversaire. La partie n'était pas gagnante, mais même Gukesh a reconnu qu'il aurait été très inquiet de voir la manœuvre 27…♗e6 suivie de 28…♖c8 arriver sur l'échiquier. Heureusement pour le Challenger, Ding Liren n’a pas vu l’idée avec 28…♖c8, et n'a pas réalisé qu'il avait un gros avantage.

C'est la deuxième fois que Gukesh se retrouve en difficulté avec les pièces blanches. Alors qu'une longue tâche défensive s'annonçait, dans une position que Ding aurait pu travailler pendant des heures, 27...♗c6?! a permis une séquence simplificatrice qui a conduit à la nulle.

Ding Liren, en conférence de presse après la cinquième partie : « Les résultats ne sont pas idéaux car j'ai eu quelques occasions dans certaines parties. Aujourd'hui [hier] aussi, après quelques vérifications rapides, j'ai eu un avantage que je n'avais pas réalisé, donc il y a quelque chose à améliorer ! »

Nous en sommes donc exactement au même point qu'après la quatrième partie, avec un score équilibré et des commentaires sur les réseaux sociaux qui pronostiquent à un moment ou à un autre l'écroulement de Ding Liren et une victoire finale de Gukesh.

Il faut reconnaître que : « Le rassurant de l’équilibre, c’est que rien ne bouge. Le vrai de l’équilibre, c’est qu’il suffit d’un souffle pour faire tout bouger. » Julien Gracq  (1910-2007). Et concernant les fautes de ces deux joueurs que nous jugeons avec sévérité, rappelons-nous : « Il n'est pas nécessaire de bien jouer aux échecs, il suffit de mieux jouer que votre adversaire. » Siegbert Tarrasch (1862-1934).

Vous l'aurez sans doute remarqué dans ce match, en à peine une dizaine de coups les joueurs se retrouvent généralement hors-théorie. C'est une très bonne nouvelle qui démontre qu'il est encore possible, même au plus haut niveau, de jouer aux échecs sans avoir recours à une nouveauté au ixième coup concoctée par ordinateur. « Il est d'une importance vitale dans toutes les ouvertures de ne pas laisser la mémoire submerger l'esprit. » David James Morgan (1894-1978)

Dans cette sixième partie du match de Championnat du Monde, Ding Liren a les pièces blanches, même si jusqu'à maintenant elles ne lui ont appporté aucun avantage. Jour de repos lundi 2 décembre 2024.

Partie n° 6 : Ding Liren - Gukesh D

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En réponse à un journaliste lors de la conférence de presse, Gukesh il a déclaré : « Je pensais que je pourrais être légèrement moins bien au sortir de l'ouverture, mais je n’en étais même pas sûr. Avec des colonnes ouvertes devant son Roi, je pensais que j’aurais toujours du contre-jeu et je ne voyais aucune raison de prendre la répétition. Évidemment, je ne jouais pas pour gagner, je voulais juste jouer quelques coups de plus et voir ce qui se passerait ».

De son côté, Ding Liren était satisfait du résultat, et du fait que le match était équilibré avec encore plusieurs parties à jouer. En même temps, il comprenait qu’il devait resserrer son jeu. « J’ai l’impression de laisser filer mon avantage aux moments critiques. Je dois améliorer ça dans les parties suivantes ».

Comme il n'y a pas grand-chose à dire de la quatrième partie, il reste à supposer que le pusillanime Ding Liren lorsqu'il a les pièces blanches, mise tout sur une contre-attaque avec les pièces noires. Il semble clair que Dommaraju Gukesh - qui est maintenant bien rentré dans le match - poussera au maximum avec l'avantage du trait.

Et c'est sans doute là que réside la véritable chance du Champion du Monde. Si le Chinois n'a pas l'énergie suffisante pour prendre le jeu à son compte, il peut encore compter sur celle de son adversaire. Au risque de tomber dans le cliché, nous pourrions faire un parallèle avec le Tai Chi (art martial chinois), basé sur la souplesse, permettant de neutraliser l'adversaire en utilisant sa propre force contre lui.

Selon les commentaires lus et entendus ici et là dans « les milieux autorisés », pour beaucoup le match semble déjà joué, et il ne reste qu’à guetter le moment où Ding Liren va s'écrouler. Si cette option est évidemment envisageable, c'est à notre avis aller un peu vite en besogne. Dans le match contre Nepomniachtchi, Ding Liren semblait sur le point d'être balayé par la plus légère des brises, mais la tempête passée, le Chinois s'est redressé jusqu’à s'emparer du titre mondial. Ainsi, même une défaite dans la cinquième partie ne sonnerait pas pour autant le glas des ambitions du Champion du Monde de conserver son titre.

De son côté, le public est devenu beaucoup plus exigeant, voire intransigeant. De nos jours, assistés par des ordinateurs qui planent à des 3300 Elo, nous nous permettons d'appeler une faute un coup qui fait passer l'évaluation du molosse cybernétique de +0.34 à -0,18, ayant déjà oublié les nombreuses erreurs qui ont émaillées les joutes entre Fischer et Spassky, ou encore Karpov et Kasparov, que nous portons cependant toujours aux nues.

« Les ordinateurs calculent très bien, mais ils n’expliquent pas ce qui est important dans une position. » écrit très justement Vasyl Ivanchuk dans la revue Europe-Echecs de décembre 2024. Emanuel Lasker (1868-1941), qui n'a pourtant jamais connu les ordinateurs, soulignait déjà ce que sont vraiment les échecs : « Il y a des éléments scientifiques et artistiques, mais ils s’effacent devant l’élément principal : le combat. »

Partie n° 5 : Gukesh D ½-½ Ding Liren

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Comme il n'y a pas grand-chose à dire de la quatrième partie, il reste à supposer que le pusillanime Ding Liren lorsqu'il a les pièces blanches, mise tout sur une contre-attaque avec les pièces noires. Il semble clair que Dommaraju Gukesh - qui est maintenant bien rentré dans le match - poussera au maximum avec l'avantage du trait.

Et c'est sans doute là que réside la véritable chance du Champion du Monde. Si le Chinois n'a pas l'énergie suffisante pour prendre le jeu à son compte, il peut encore compter sur celle de son adversaire. Au risque de tomber dans le cliché, nous pourrions faire un parallèle avec le Tai Chi (art martial chinois), basé sur la souplesse, permettant de neutraliser l'adversaire en utilisant sa propre force contre lui.

Selon les commentaires lus et entendus ici et là dans « les milieux autorisés », pour beaucoup le match semble déjà joué, et il ne reste qu’à guetter le moment où Ding Liren va s'écrouler. Si cette option est évidemment envisageable, c'est à notre avis aller un peu vite en besogne. Dans le match contre Nepomniachtchi, Ding Liren semblait sur le point d'être balayé par la plus légère des brises, mais la tempête passée, le Chinois s'est redressé jusqu’à s'emparer du titre mondial. Ainsi, même une défaite dans la cinquième partie ne sonnerait pas pour autant le glas des ambitions du Champion du Monde de conserver son titre.

De son côté, le public est devenu beaucoup plus exigeant, voire intransigeant. De nos jours, assistés par des ordinateurs qui planent à des 3300 Elo, nous nous permettons d'appeler une faute un coup qui fait passer l'évaluation du molosse cybernétique de +0.34 à -0,18, ayant déjà oublié les nombreuses erreurs qui ont émaillées les joutes entre Fischer et Spassky, ou encore Karpov et Kasparov, que nous portons cependant toujours aux nues.

« Les ordinateurs calculent très bien, mais ils n’expliquent pas ce qui est important dans une position. » écrit très justement Vasyl Ivanchuk dans la revue Europe-Echecs de décembre 2024. Emanuel Lasker (1868-1941), qui n'a pourtant jamais connu les ordinateurs, soulignait déjà ce que sont vraiment les échecs : « Il y a des éléments scientifiques et artistiques, mais ils s’effacent devant l’élément principal : le combat. »

Partie n° 5 : Gukesh D - Ding Liren

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Le sentiment qui prédominait un peu partout après la deuxième partie est celui du GM Fabien Libiszewski, dont nous vous recommandons la rubrique « En finales avec Libi ! » dans la revue Europe-Echecs : Ding avait une position pour jouer un bon moment, sans le moindre risque, mais il a donné la nulle à son adversaire sans le forcer à trouver de bons coups.

En jetant un œil sur ses 50 dernières parties classiques, on remarque que Ding Liren n'a joué que 10 parties de plus de 50 coups, alors que 32 se sont achevées en moins de 40 coups. Peut-être que le Champion du Monde craint de ne pas avoir une condition physique suffisante pour mener de longs combats, et préfère alors se contenter du demi-point lorsque la position n'est pas assez prometteuse à son goût. 

Dans cette troisième partie du match, avant le premier jour de repos du jeudi 28 novembre, Gukesh D retrouve les pièces blanches et a déjà prévenu : « Je vais essayer de jouer une bonne partie, car après tout, la seule chose que l’on puisse faire pour essayer de gagner est de jouer une bonne partie ». Ding Liren ne sera guère surpris, puisqu'il a déclaré hier : « Je pense que ce sera un gros combat – il est mené d’un point et il a les pièces blanches, donc je suis prêt pour le combat ». « Chat échaudé craint l'eau froide », il ne faudra donc pas compter voir Gukesh D reproduire les mêmes erreurs que lors de la première partie. Toutefois, après la défense Française, Ding Liren, avec l'aide de son secondant Richard Rapport, pourrait bien avoir un autre tour dans son sac pour éviter les préparations trop pointues.

À la question de Maurice Ashley : Préférez-vous jouer avec les Blancs ou les Noirs, Gukesh a répondu : « Évidemment les Blancs ont toujours un léger avantage, mais je pense que de nos jours la différence est moindre à cause de toutes les lignes que l'ordinateur propose. C'est comme jouer une partie normale. Je n'ai pas vraiment de préférence. »

Suivre les parties en direct sur https://www.europe-echecs.com/live/2024-championnat-du-monde-ding-gukesh — 14 parties classiques à la cadence de 120 minutes pour les 40 premiers coups, puis un ajout de 30 minutes pour le reste de la partie, avec un incrément de 30 secondes à partir du 41e coup seulement. Le joueur qui marquera 7,5 points ou plus sera couronné Champion du Monde d'Échecs.

Gukesh sur les critiques de Magnus Carlsen concernant sa première partie : « C'était une mauvaise partie, mais je me sentais globalement bien... J'ai toujours su qu'une fois que je serais à l'aise, je retrouverais mon rythme. »

« Le résultat de la partie influencera peut-être mes émotions pendant la journée de repos. » Ding Liren, qui a confirmé, comme Judit Polgar l'avait supposé pendant la partie, qu'il a raté le 23.♘e2! de Gukesh dans ses calculs.

« Cette ligne est arrivée comme une surprise. Peut-être qu'après 7.h3 je n'avais plus aucune connaissance de cette ligne ». Ding Liren

« Si Ding Liren est supérieur à Gukesh positionnellement, tactiquement il est clairement un ton en dessous ». Étienne Bacrot

Gukesh D au sujet de ses longs temps de réflexion dans les derniers coups : « J'étais assez confiant à ce moment-là. Je pensais juste à la position car je savais que je devais gagner. Je ne jouais pas pour gagner du temps. J'aime juste finir proprement. »

« Ding retombe complètement dans ses travers. Sa nulle hier sans rien essayer n'était déjà pas de très bon augure, et aujourd'hui, patatras ! Défaite express avec de très mauvaises décisions. La journée de repos sera-t-elle bénéfique pour repartir du bon pied ? » Fabien Libiszewski

Partie n° 3 : Gukesh D 1-0 Ding Liren

Après avoir lu un tas d'éloges panégyriques sur Gukesh avant le début de ce match de championnat du monde, il ne faudrait pas tomber dans l'excès inverse et vouer l'Indien aux gémonies pour sa défaite dans la première partie à cause de son jeu ambitieux.

Ce dont on peut se réjouir c'est évidemment d'avoir vu un Ding Liren en capacité de relever le défi. « Très peu de gens s'attendaient à ça ! Félicitations Ding ! Maintenant que l'approche du match a totalement changé, voyons si Gukesh peut également réagir comme un champion ! » Romain Édouard

Nous en avons déjà parlé hier, des commentateurs qui avaient enterré Ding Liren vivant n'ont cessé de retropédaler ici et là longtemps après cette victoire du Chinois. « Je suis simplement un journaliste qui rapporte les faits. » se défendait l'un, « Ce serait ennuyeux si les échecs étaient prévisibles, » écrivait l'autre. Quant aux sites de statistiques, avec des pronostics donnant Gukesh avec un très haut pourcentage, « Avec le recul, on change constamment notre façon de voir les choses. » C'est amusant.

Treize parties donnent à Gukesh largement le temps de revenir au score, et beaucoup auront l'occasion d'affirmer qu'ils avaient raison en fonction de l'évolution de ce match. Dans cette deuxième partie, avec les pièces noires, l'Indien ne doit surtout pas commettre l'erreur de forcer les événements pour tenter d'égaliser au plus vite. Face à lui, avec un point de plus et l'avantage des pièces blanches, Ding n'a toutefois pas de raison impérieuse de chercher à gagner à tout prix ; l'objectif final n'est pas d'écraser son adversaire 8 à 0, sinon d'être le premier à marquer 7,5 points. Il va sans dire que les deux joueurs resteront néanmoins à l'affût de la moindre faute adverse. Une deuxième victoire de Ding Liren ferait l'effet d'une bombe !

Suivre les parties en direct sur https://www.europe-echecs.com/live/2024-championnat-du-monde-ding-gukesh — 14 parties classiques à la cadence de 120 minutes pour les 40 premiers coups, puis un ajout de 30 minutes pour le reste de la partie, avec un incrément de 30 secondes à partir du 41e coup seulement. Le joueur qui marquera 7,5 points ou plus sera couronné Champion du Monde d'Échecs.

Partie n° 2 : Ding Liren - Gukesh D

Ding Liren : « Il ne s'est pas passé grand chose dans la partie... à un moment donné, j'ai pensé que j'avais mal joué ma préparation ! »

Ding Liren : « L'idée de base était de jouer prudemment, je suis tout-à-fait satisfait avec la nulle et je suis content du résultat final. »

Gukesh D : « Ce n'était pas une énorme surprise. C'est l'une des lignes d'actualité. Je pense que j'ai obtenu une position assez confortable. Faire nulle avec les Noirs dans un match de championnat du monde c'est toujours bon. »

Anish Giri : « Une nulle compréhensible compte tenu des couleurs. Si tôt dans le match, Ding se contente de préserver l'avantage, tandis que Gukesh se contente de récupérer d'une défaite et de recharger ses batteries pour la partie avec les Blancs demain ».

Fabien Libiszewski : « Nulle tristoune en 23 coups aujourd'hui. Il n'y a pas eu de combat. L'avenir nous dira si Ding a pris une bonne décision, mais à chaud je dirais plutôt non, et qu'il avait une position pour jouer un bon moment sans risque. À la place il donne la nulle à son adversaire sans le forcer à défendre et trouver quelques bons coups. »

Après la partie, Ding Liren a expliqué « Je me suis rappelé que mon secondant avait dit qu’après 12.b3, il y avait 0.2 selon l’ordinateur, donc j’ai peut-être raté quelques opportunités ». Le moment clé de la partie a été 14.♖dc1. Hors préparation, Ding Liren a abandonné la colonne ouverte afin d’éviter les échanges et pour se regrouper. Cependant, si « Le coup ♖c1 est une idée typique dans ce genre de structures, je ne pense pas que ce soit un bon coup dans la partie. Je ne savais pas comment me développer alors qu’il avait un fort Cavalier en d4. En fait, plus tard, j’ai déplacé la Tour en d1, ce qui signifie que je n'étais pas content d’avoir la Tour en c1 ».

« Je pense qu'une des choses qu'AlphaZero a réussi à faire a été d'une part de nous aider à découvrir de nouvelles idées, et d'autre part à justifier peut-être l'approche humaine des échecs. À l'époque où Alpha Zero est arrivé, cela faisait plusieurs années que nous n'avions plus que des moteurs super puissants, mais qui s'appuyaient beaucoup sur du calcul brute. Puis, soudainement, le style de jeu d'AlphaZero était en quelque sorte humain, justifiant les sacrifices matériels pour restreindre la mobilité des pièces adverses », a expliqué Nenad Tomasev, chercheur chez Google DeepMind, sur le stream du Championnat du monde de la FIDE.

Vishy Anand à propos de la défaite de Gukesh dans la première partie : « Il a perdu hier. Ce n'était pas aussi simple [que ma défaite contre Topalov dans la première partie du match de 2010], ce n'est pas qu'il a raté un coup, c'était difficile et il a même eu quelques chances, donc son approche n'était pas mauvaise, mais il a en quelque sorte tout gâché à la fin. »

Les rumeurs sur la « mort » de Ding Liren étaient apparemment grandement exagérées. Alors que la plupart des commentateurs et plusieurs joueurs du top mondial avaient enterré le champion du monde avant même le premier coup de ce championnat du monde, on assiste désormais à de véritables salves de palinodies des uns et des autres. Le Chinois a remporté la première partie avec les pièces noires face à Dommaraju Gukesh !

« Bien sûr, je me sens très bien. Je n'avais pas gagné une seule partie classique depuis longtemps, et aujourd'hui j'ai réussi à le faire. Mais pour être honnête, j'ai été très chanceux car j'ai raté deux tactiques. » Ding Liren

Selon le champion du monde, dans la variante non jouée : 30.♗c5 ♕xg4 sur 31.♕xh7? il n'avait pas prévu 31...♕d4+!! à l'avance. Et aussi, Ding a dit qu'il n'avait pas calculé le dernier coup 42.♗e6+ et qu'il a eu « beaucoup de chance » d'avoir 42...♔h8! après quoi Gukesh a abandonné.

La dernière victoire de Ding en partie classique remontait au 27 janvier 2024, à Wijk aan Zee, contre Max Warmerdam. Reverrons-nous la défense Française dans ce match ? Ce n'est pas sûr, Ding a laissé entendre lors de la conférence de presse que c'était un « one shot ».

« Je dois dire qu'aujourd'hui j'ai passé presque toute la partie assis devant l'échiquier et non pas caché dans le salon des joueurs comme lors de la première partie la dernière fois. C'était totalement nouveau pour moi. » Ding Liren

Lors du tirage au sort des couleurs, effectué pendant la cérémonie d'ouverture, Ding Liren a obtenu les Noirs. Ainsi, Gukesh jouera la première partie avec l'avantage des pièces blanches.

Dans un article du The New York Times du 22 novembre 2024, Dylan Loeb McClain écrit : « Jamais un champion du monde d'échecs n'a semblé aussi vulnérable. »

« La question est de savoir s'il a été en quelque sorte définitivement brisé par le dernier championnat du monde », a déclaré Magnus Carlsen. « Je n'en suis pas sûr, mais je pense qu'il est possible qu'il le soit. » Dans une interview en octobre, Hikaru Nakamura, a déclaré : « Je ne pense pas que ce sera un match serré. Je pense que tous les signes indiquent une victoire claire et dominatrice de Gukesh. » Si Gukesh l'emportait, il deviendrait alors le plus jeune champion du monde de l’histoire, battant le record de Kasparov. De son côté, Gukesh ne prend rien pour acquis. S’adressant au Hindustan Times le mois dernier, il a déclaré : « Je ne crois pas aux pronostics ni aux favoris et je n’adhère pas vraiment à ce que les gens disent sur le match », ajoutant : « Je me prépare pour jouer Ding à son meilleur niveau. »

Ils ont dit...

« Ça va être un massacre ! » Arjun Erigaisi

« Il n’y a que deux prédictions raisonnables. Ou ce sera serré ou Gukesh gagnera avec une marge importante. » Jacob Aagaard

« Je crains de perdre très largement. » Ding Liren

« Je pense que l'histoire des matchs de championnat du monde, qui a commencé ici à Saint-Louis, avec Steinitz face à Zukertort en 1886, s'est terminée avec Magnus Carlsen. Il y a eu 16 champions du monde. Ce sont ceux qui ont remporté le titre en battant le meilleur joueur du monde. » Garry Kasparov

« Aux échecs, nous avons du mal à accepter l’idée que nous ne sommes qu’un sport. Prenons l’exemple du cyclisme. Celui qui remporte le championnat du monde de cyclisme n’est pas nécessairement le meilleur cycliste, et tout le monde est d’accord avec ça. Aux échecs, pour une raison ou une autre, nous n’aimons pas l'idée que le champion du monde ne soit pas le meilleur joueur du monde. » Peter Heine Nielsen

« À sa place, je me dirais que tout ce qui s'est passé ces dernières années n'a aucune importance, s'il remporte le championnat du monde, tout cela sera très vite oublié. Il n'a donc pas grand-chose à perdre. » Magnus Carlsen

« Ding n'a rien à perdre. Gagner le titre mondial, le plus grand titre aux échecs, même si tu ne gagnes plus rien d'autre, tu as déjà fait ton devoir. » Wesley So

« J’ai tendance à penser qu'une victoire de Ding serait très mauvaise pour les échecs. Avec tout l’intérêt que suscite l’Inde en ce moment, je pense qu’une victoire de Ding ferait peut-être reculer les échecs de deux ou quatre ans. » Hikaru Nakamura

« Depuis que je me suis qualifié, ce match est ma principale préoccupation. » Gukesh

« J'ai commencé ma préparation il y a trois semaines. » Ding Liren

« Lors de mon premier match de Championnat du monde, j'étais très nerveux. Cette fois, je me sens en paix et avec beaucoup d'énergie. » Ding Liren

« Je pense que ce sera un match très difficile pour Ding, mais j'espère qu'il pourra y prendre du plaisir... Il pourrait livrer un bon combat, car c'est un joueur fantastique et une bonne personne. J'espère pour lui qu'il le fera bien. » Magnus Carlsen

Partie n° 1 : Gukesh D 0-1 Ding Liren

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Le match de championnat du monde d'échecs de la FIDE, organisé tous les deux ans, met aux prises le champion du monde actuel, le Chinois Ding Liren, qui a obtenu son titre en battant le Russe Ian Nepomniachtchi aux départages, à Astana, au Kazakhstan, en avril 2023, face au challenger, l'Indien Dommaraju Gukesh, vainqueur du tournoi des candidats organisé à Toronto en avril 2024. Le match de championnat du monde de la FIDE 2024 se déroule à Singapour, du mercredi 20 novembre (arrivée) au dimanche 15 décembre 2024 (départ). Site officiel : https://worldchampionship.fide.com

Voir, voire revoir...

Ding Liren

En 2014, la performance de Ding a valu à la Chine une médaille d'or aux Olympiades, puis en 2015 aux Championnats du monde par équipes. Cette même année, il est devenu le deuxième joueur chinois à entrer dans le top 10 après Wang Yue. En 2018, Ding a remporté l'or individuel et par équipe aux 43e Olympiades d'échecs et est devenu le premier joueur chinois à dépasser les 2800 Elo, atteignant un classement de 2816, soit le dixième classement le plus élevé de l'histoire des échecs. Sa performance lui a valu d'être l'un des joueurs les plus difficile à battre ; d'août 2017 à novembre 2018, Ding a eu une série de 100 parties sans défaite en classique, un exploit surpassé uniquement par Magnus Carlsen en 2019.

Sa véritable chance de remporter le titre s'est présentée à Madrid en 2022, lors de son troisième Tournoi des Candidats. Il s'est qualifié pour Madrid grâce à son classement Elo, mais aussi après avoir joué une série de tournois organisés à la hâte en Chine et avoir bénéficié de la disqualification de Sergey Karjakin. S'assurant la deuxième place derrière Ian Nepomniachtchi, dans des circonstances normales cela n'aurait pas été suffisant pour jouer un match de Championnat du monde. Cependant, Magnus Carlsen ayant refusé de défendre son titre, le match a été organisé contre Ian Nepomniachtchi.

Le match de Championnat du monde 2022 a eu lieu à Astana, au Kazakhstan. La performance de Ding a été instable, mais celle de Nepomniachtchi l'a été tout autant au fur et à mesure que le match avançait. À la fin des parties classiques, le score était de 7 à 7, ce qui a conduit à un départage en parties rapides. Dans ce match, Ding a triomphé 2½ à 1½, devenant ainsi le premier joueur chinois à remporter le titre de champion du monde d'échecs classiques. Voir, voire revoir ce match : https://www.europe-echecs.com/art/championnat-du-monde-d-echecs-2023-8991.html

Son exploit monumental de 2023 a toutefois été rapidement éclipsé par des difficultés. Après avoir remporté le titre mondial, la performance de Ding a chuté pour des raisons personnelles et une dépression. Cela l'a conduit à faire une pause de neuf mois en 2024, ratant des événements majeurs pour donner la priorité à sa santé mentale. Ding est revenu sur l'échiquier plus tard cette même année, au tournoi Tata Steel et à la 45e Olympiade d'échecs, montrant qu'il est toujours présent et qu'il reste une force avec laquelle il faut compter.

Dommaraju Gukesh

Gukesh a attiré l'attention du monde entier en 2022 lorsqu'il a remporté l'or individuel aux Olympiades d'échecs, marquant un total de neuf points sur 11 parties et aidant l'équipe de l'Inde à remporter le bronze. La même année, Gukesh a franchi la barre des 2700 Elo, devenant ainsi le troisième plus jeune joueur d'échecs à y parvenir après Wei Yi et Alireza Firouzja, entrant ainsi dans le club des super-grands-maîtres.

En 2023, il va encore plus loin, franchissant la barre des 2750 Elo en août et devenant ainsi le plus jeune joueur à y parvenir, puis en septembre, Gukesh atteint la huitième place mondiale, dépassant Viswanathan Anand comme le meilleur joueur indien, un titre qu'Anand a détenu pendant plus de 37 ans. La même année, Gukesh termine deuxième du circuit FIDE 2023, ce qui lui assure une place aux candidats 2024. 

En avril 2024, à Toronto, Gukesh surprend à nouveau le monde des échecs : lors de sa toute première apparition au tournoi des candidats, il remporte l'événement avec un score impressionnant de 9 points sur 14.Voir, voire revoir les Candidats sur https://www.europe-echecs.com/art/fide-candidates-2024-9181.html

Lors de la 45e Olympiade d'échecs à Budapest, jouant au premier échiquier, Gukesh a marqué neuf points sur dix parties, menant son équipe à sa toute première médaille d'or par équipe dans cette épreuve. Sa dernière apparition avant le match a été la Coupe d'Europe des Clubs en novembre 2024 dans laquelle Gukesh (2794) a obtenu un résultat de 4 points sur 7 (2 victoires, 4 nulles et 1 défaite), une performance à 2608 et une perte de 11 points Elo.

Règlement du match

Le match est composé de 14 parties classiques à la cadence de 120 minutes pour les 40 premiers coups, suivi de 30 minutes pour le reste de la partie, avec un incrément de 30 secondes à partir du 41e coup. Le joueur qui marque 7,5 points ou plus remporte le match. Si le score est égal après 14 parties, le vainqueur sera déterminé par un départage. Le tirage au sort des couleurs sera effectué pendant la cérémonie d'ouverture. Le joueur qui obtient les Blancs dans la première partie aura les Blancs dans toutes les parties classiques impaires.

Calendrier du match

Le championnat du monde se déroule sur 3 semaines, du mercredi 20 novembre (arrivée) au dimanche 15 décembre 2024 (départ), avec 14 jours de parties et 4 jours de repos. Première partie lundi 25 novembre. Toutes les parties débutent à 17 h 00 heure locale (GMT+8), soit 10 h 00 du matin en France, avec des jours de repos après les parties 3, 6, 9 et 12. Un départage, si nécessaire, aura lieu le 13 décembre, suivi de la cérémonie de clôture le 14 décembre 2024. Voir le calendrier complet du match sur www.europe-echecs.com/art/fide-world-championship-2024-9351.html#programme

Départages

Après consultation des deux joueurs, le format des départages a changé pour introduire une diminution progressive des cadences. Quatre parties à la cadence de 15 minutes + 10 secondes par coup. Si le score est toujours à égalité, un match en deux parties à la cadence de 10 minutes + 5 secondes. Si le score est toujours à égalité, un match en deux parties à la cadence de 3 minutes + 2 secondes. Si le score est toujours à égalité, une seule partie à la cadence de 3 minutes + 2 secondes. Si l'égalité persiste, une autre partie à la cadence de 3 minutes + 2 secondes par coup. Si encore et toujours égalité, la procédure est reproduite jusqu'à obtenir un résultat décisif. Voir l'intégralité du règlement sur https://handbook.fide.com/files/handbook/FWCM2024.pdf

Distribution des prix

Le montant total des prix du match est de 2,5 millions de dollars (environ 2.310.000 €), avec une distribution en fonction des résultats des parties. Chaque joueur recevra 200.000 dollars (environ 185.000 €) pour chaque partie gagnée. Le reste des prix sera réparti équitablement entre les joueurs. Si le vainqueur l'emporte au départage, le prix sera divisé comme suit : le vainqueur recevra 1.300.000 dollars (environ 1.200.000 €) et le finaliste 1.200.000 dollars (environ 1.110.000 €).

Jeu d'échecs officiel

Le jeu d'échecs emblématique du Championnat du monde FIDE est utilisé exclusivement lors des matchs et des événements cycliques du Championnat du monde d'échecs. Conçu par Daniel Weil de Pentagram pour World Chess, inspiré du style Staunton, ce jeu a été réalisé avec l'aide de Vladimir Kramnik et Magnus Carlsen.

Du tournoi de La Haye/Moscou 1948 à Berlin 2018

Après la mort d’Alekhine survenue le 24 mars 1946, le titre de champion du monde d’échecs était devenu vacant. Ce fut l’occasion pour la Fédération Internationale des Échecs (FIDE) de s’emparer du contrôle de l’organisation du championnat du monde. Jusqu’ici, les tenants du titre étaient seuls juges pour choisir leurs adversaires. Le 17e Congrès de la FIDE, en 1946, mit un terme à cette situation. Il fut décidé d’organiser un tournoi entre les meilleurs candidats.

En 1948, Botvinnik remporta le premier prix et fut sacré 6e champion du monde de l’histoire à Moscou. Il était convenu que tous les trois ans il devait affronter un adversaire issu d’un tournoi des Candidats. Le premier eut lieu à Budapest en 1950 avec les cinq Candidats de l’édition précédente et cinq joueurs issus du tournoi interzonal de Saltsjöbaden en Suède. Mais durant cette période de guerre froide, Fine et Reshevsky n’obtinrent pas les visas nécessaires par le département d’État américain pour se rendre à Budapest. Bronstein fut le premier challenger issu de ce nouveau système de qualification, puis suivirent Smyslov en 1953 et 1956, Tal en 1959 et Petrossian en 1962.

La qualification de Petrossian provoqua une violente réaction de la part du champion américain Bobby Fischer qui dénonçait un complot de la part des Soviétiques qui s’étaient unis contre lui. Toutes les parties entre Petrossian, Keres et Geller s’étaient terminées par des nulles rapides, alors que lui devait, au contraire, tous les affronter dans de dures et longues batailles.

À partir de 1965, le Tournoi des Candidats fut remplacé par des matchs pour éviter ce genre de coalition. Les arguments de Fischer avaient porté, mais il se retira du cycle et c’est Spassky qui s’imposa en 1965 et 1968. 1971 vit le retour de Fischer, puis son sacre en 1972. La qualification de Karpov en 1974 lui permit de devenir le 12e champion du monde sur le tapis vert, Fischer ayant renoncé à défendre son titre. La formule des matchs devaient se poursuivre avec Korchnoi et Kasparov.

Puis Kasparov s’appropria le titre et réussit à casser le système pour soustraire l’organisation du championnat du monde de la juridiction de la FIDE. On vit alors apparaître deux champions, l’un issu du système FIDE et l’autre du système Kasparov, dit « classique ». Kramnik réussit à détrôner Kasparov en 2000, alors que les champions FIDE depuis Karpov restaient dans l’ombre soit Khalifman, Anand, Ponomariov, Kasimdzhanov et Topalov.  

Georges Bertola, rédacteur en chef de la revue Europe-Echecs, avril 2018.

Championnats du monde depuis 2006

Le programme du match