À la une des échecs depuis 1959

En remportant le Tournoi des Candidats de Toronto, Dommaraju Gukesh devient, à 17 ans, le plus jeune Challenger de l’histoire. Lors de son retour à Chennai, Gukesh reçut un accueil triomphal digne d’une popstar.
Actuellement dans le top 20 du classement mondial, trois autres Indiens occupent le devant de la scène : Arjun Erigaisi, le légendaire Viswanathan Anand et Praggnanandhaa Rameshbabu.
Le Nord de l’Inde. C’est ici que débute l’histoire des échecs il y a 1500 ans, s’accordent à penser la plupart des historiens. Du moins c’est l’une des principales hypothèses qui a mis fin au mythe de Palamède, ce prince qui prit part à la guerre de Troie et dont au XIXe siècle on s’évertuait à proclamer qu’il en était l’inventeur. Une imposture pour attribuer aux échecs une origine venue de la Grèce antique. Depuis, le jeu s’est enrichi et a enrichi les diverses cultures qui ont jalonné son existence, l’Empire perse, le monde musulman du Moyen-Orient avant de parvenir en Europe.
En observant l’actuel drapeau de l’Inde et la roue qui est en son centre, je ne peux m’empêcher de penser qu’elle symbolise en quelque sorte des valeurs échiquéennes. Le chakra d’Ashoka est la roue de la loi de l’univers, du Dharma. La roue exprime le mouvement. La mort est dans la stagnation. La vie est dans le mouvement.
« Les 24 rayons de l'Ashoka Chakra sont souvent interprétés comme représentant les 24 heures de la journée, symbolisant que la nation doit être en mouvement et progresser 24 heures sur 24. Au-delà de cela, le Chakra est également considéré comme une représentation de l’unité et de l’harmonie. »
La boucle est bouclée, mais pendant bien des siècles l’apport des Indiens aux échecs était insignifiant. L’un des premiers dont nous connaissons quelques parties est Moheschunder Bannerjee, surnommé le Brahmane, qui disputa un match en 1852 contre John Cochrane, l’un des meilleurs joueurs britanniques. Moheschunder Bannerjee avait assimilé les règles européennes, mais s’inspira des règles indiennes qui ne permettaient aux pions que d’avancer d’une case pour innover dans les ouvertures en jouant ce que l’on nommera plus tard les « défenses Indiennes ».
Au début du XXe siècle, Mir Malik Sultan Kahn issu de l’Empire des Indes britanniques, plus précisément du Pakistan, réussit une fulgurante carrière avec trois titres de champion d’Angleterre et rivalisait avec les meilleurs joueurs du monde. Cette année, la FIDE lui a rendu un hommage posthume avec un titre de grand-maître.
Puis en 2000, l’Inde couronne son premier champion du monde FIDE de l’histoire moderne, Viswanathan Anand qui remporte par la suite le tournoi de la réunification du titre en 2007 à Mexico. L’année suivante Anand s’impose clairement en match face au Russe Kramnik détenteur du titre classique. Une figure majeure de l’histoire des échecs qui reste, à 54 ans, l’un des meilleurs joueurs du monde.
Vishy Anand est sans aucun doute à l’origine du renouveau des échecs en Inde qui s’affirme aujourd’hui comme l’une des plus grandes nations, favorites avec les Etats-Unis pour remporter la prochaine olympiade qui se jouera à Budapest en septembre prochain.

Bonne lecture.
Georges Bertola