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Le titre de champion du monde « classique » consacre à la fois Ding Liren et la Chine. C’était le seul et prestigieux titre manquant au fabuleux palmarès des Chinois !
Ce match ressuscite la dimension humaine, soit faillible, un véritable combat de gladiateurs avec 6 parties décisives en cadence « classique ».
Autant de victoires que les matchs de Carlsen contre Karjakin, Caruana et Nepomniachtchi réunis !
Rebondissements, erreurs, fatigue et craquage psychologique étaient à l’ordre du jour. Carlsen, au contraire, après une domination d’une décennie sans partage, nous avait donné l’illusion que jouer à la perfection comme un ordinateur était du domaine de l’humain. Confiant dans ses possibilités, en ne commettant pratiquement pas d’erreurs, il refreinait l’ardeur de ses adversaires dans la prise de risques.
A Astana, au contraire, les deux hommes se sont battus dans toutes les parties, parfois au-delà du raisonnable.
« Le match s'est avéré passionnant. Si beaucoup ont critiqué la qualité du jeu, je pense que cela a été causé par deux éléments : 1) les ordinateurs sont devenus plus forts, alors que l'homme est resté aussi faible qu'il l'était - en tant qu'humain. 2) le répertoire actuel des ouvertures s'est grandement étendu, et la charge mémorielle a terriblement augmenté. » GMI Murtas Kazhgaleyev
Dans les faits, cela se vérifie. L’écart se creuse chaque année davantage entre les meilleurs humains et l’ordinateur, l’évolution de la théorie des ouvertures et la quantité de données à assimiler nécessitent un travail colossal.
Ding Liren a contourné partiellement le problème posé par l’ouverture en diversifiant à de nombreuses reprises, rendant le travail de préparation aléatoire. Vous trouverez d’excellentes analyses du match par nos habituels grands-maîtres dans ce numéro.
De plus, Ding Liren a privilégié la dynamique des pièces au détriment des structures de pions dans plusieurs milieux de parties. Avec, pour conséquence, la nécessité de calculer en profondeur, ce qui favorise l’erreur et les déséquilibres.
« Beaucoup de spectateurs n'ont plus aucune idée de ce qu'un joueur traverse sur un échiquier, parce qu'ils sont assis à regarder avec des logiciels d'analyse. Vous devriez vous asseoir à la table, transpirer et ressentir la peur de la défaite ou la proximité de la victoire pour comprendre ce qui se passe dans la tête d'un joueur… Si vous pensez que c'est facile, éteignez votre module et essayez de trouver quelques coups par vous-mêmes. » L’ex-champion du monde Vishy Anand
Tout s’est joué sur de petits détails dans un match très équilibré. Mais le diable se cache dans les détails et à ce jeu Ian Nepomniachtchi ne s’est pas révélé le meilleur.
« J’ai eu mes chances et de nombreuses positions prometteuses. J'aurais probablement dû essayer de terminer en classique, car c'était juste une question d'un ou deux coups précis. »
Ian Nepomniachtchi
Après 14 parties, les deux hommes étaient à égalité et, à nouveau, le titre s’est décidé au départage dans les rapides…
Le nouveau champion du monde Ding Liren a lutté vaillamment, montré de la résilience après un parcours semé d’embûches, mais il lui reste à prouver que son titre n’est pas seulement celui que lui a décerné la FIDE.

Bonne lecture.

Georges Bertola