À la une des échecs depuis 1959

La présence de Susan Polgar, marraine du championnat de France des Jeunes 2019 à Hyères et l’accueil chaleureux qu’elle a reçu démontre que les femmes ont imposé leur image à l’égale des hommes. Un succès qui n’avait rien à envier à celui d’Anatoly Karpov l’an dernier à Agen. En un demi-siècle les meilleures féminines sont peu à peu parvenues à tenir tête à la majorité des grands-maîtres masculins et leurs performances ont atteint un niveau incomparable par rapport aux championnes du passé. Celles qui pouvaient rivaliser avec les hommes se comptaient sur les doigts d’une main dans les années 60-70 et elles étaient toutes issues de l’Union soviétique, plus particulièrement de Géorgie. Pendant près de deux décennies Nona Gaprindashvili conserva le titre, invaincue, et en 1981 lorsque Susan Polgar fut l’une des premières femmes à obtenir le titre de grand-maître masculin, c’était Maia Chiburdanidze qui portait la couronne. Elle fut bientôt détrônée en 1991 par la Chinoise Jun Xie. Ceci marqua la fin de l’hégémonie soviétique et ce fut aussi la dissolution de l’URSS.
Cette époque voit l’émergence du phénomène Polgar. Les trois sœurs, Susan, Sofia et Judit, obtenaient des résultats stupéfiants dans les tournois masculins infligeant des défaites aux meilleurs grands-maîtres. Comme aime à le dire Susan « À ce moment-là, je ne gagnais que contre des hommes malades ! » Lorsqu’elle remporte le titre en 1996 face à Jun Xie, sa sœur remettait sérieusement en question la suprématie masculine. Elle avait déjà détrôné le record de précocité de Bobby Fischer avec un titre de grand-maître à 15 ans et pas tout à fait cinq mois, et entrait pour la première fois de l’histoire dans le « Top 10 » avec 2675 points Elo.
Un coup de chapeau à Marie Sebag qui est sacrée vice-championne d’Europe devancée par la Russe Alina Kashlinskaya. Seule la Franco-Moldave Almira Skripchenko a fait mieux avec une victoire en 2001.
Tournoi remarquable de la championne de France Pauline Guichard avec une 6e place, distancée d’un demi-point et réalisant une performance à 2514 Elo !
Le président de la FIDE, Arkady Dvorkovich, s’était engagé à reformer l’organisation du championnat du monde féminin et c’est chose faite ! Le système au K.O. est abandonné et la nouvelle formule tend vers une égalité hommes-femmes avec un tournoi des Candidates suivi par un match en 12 parties. (14 chez les hommes).
Les prix seront sensiblement revus à la hausse, 500.000 euros, alors que pour le dernier championnat du monde la Chinoise Wenjun Ju a encaissé 90.000 euros et la finaliste Kateryna Lagno 30.000 ! On ne peut encore parler de parité par rapport aux 2 millions d’euros accordés aux hommes mais c’est un signal dans la bonne direction.
Le 31 mai a débuté à Kazan le tournoi des Candidates, un double rondes doté de 200.000 euros de prix qui permettra de désigner la prétendante au titre mondial qui affrontera Wenjun Ju. Des conditions alléchantes qui inciteront peut-être la première au classement mondial, la Chinoise Yifan Hou (2662 Elo), à reconsidérer sa position pour tenter de reconquérir le titre suprême.
Comme à l’accoutumée, l’actualité est abondante, le champion du monde Magnus Carlsen, actuellement sur un nuage, remporte haut la main le super tournoi de Grenke devançant son plus proche poursuivant, le vice-champion du monde Fabiano Caruana de 1,5 points ! Carlsen gagne 14 points Elo et semble en mesure d’améliorer son record mondial de 2014 qui culminait à 2882 !
Magnus est aussi le héros de ce numéro où vous retrouverez nos chroniqueurs aux commentaires de quelques-uns de ses exploits.

Bonne lecture.

Georges Bertola