À la une des échecs depuis 1959

Le jeu d’échecs a considérablement évolué. Depuis 25 ans, il y a eu une accélération des changements dans l’approche du jeu dus aux bases de données et aux nouvelles technologies.

Auprès du grand public, le mythe de la domination suprême de l’homme sur la machine s’est écroulé lors du match Kasparov-Deep Blue. Notre numéro de juin 1997 qui s’intitulait « l’humiliation » illustrait ce séisme.

Depuis cette date, internet s’est engouffré dans tous les foyers ;ce qui permet aujourd’hui de suivre en temps réel les différentes compétitions.

Au temps des championnats du monde de 1970 à 1990, le grand public suivait ces joutes car le jeu d’échecs représentait, au-delà des joueurs, la rivalité du monde libre par rapport au « rideau de fer » pour Fischer-Spassky. Les matchs Kasparov-Karpov s’inscrivirent durant la fin de l’Union soviétique.
Les passionnés du jeu étaient ébahis par la performance de ces champions légendaires.

Hors de l’analyse d’autres grands-maîtres, il n’y avait pas de possibilités de comprendre leurs stratégies de manière claire.

Le mystère de ces joueurs hors du commun amplifiait le mythe d’hommes exceptionnels eu égard à leurs capacités intellectuelles.

Les bases de données, combinées à internet, ont fait tomber bon nombre de joueurs de leur piédestal.

Lors des matchs Kasparov-Karpov, il fallait plusieurs jours avant de connaître la vérité sur les parties jouées.

À Sofia, en 2010, lors du championnat du monde disputé par Anand et Topalov, le spectateur ou l’internaute était « le champion du monde » car il pouvait suivre en direct avec les moteurs d’analyses les meilleures suites.

Aujourd’hui, le spectateur se demande juste si le champion va jouer le coup proposé par son logiciel.
Cette réalité change totalement la donne, puisqu’il s’agit aujourd’hui de vérifier combien d’erreurs aura commis le champion du monde lors de ses parties. Ceci désacralise, en partie, le jeu pour les passionnés.

Même Mikhaïl Tal, surnommé le « Magicien de Riga », ne serait plus affublé de ce titre aujourd’hui car toutes ses parties sont analysables et la « magie » n’opérerait plus.

Le match des Candidats à Kazan est un exemple qu’il ne faudrait pas renouveler dans le monde des échecs : le trop grand nombre de parties nulles dû à la peur de tomber dans des pièges de préparation a amené de nombreux joueurs à opter pour les matchs de départages. Alors pourquoi jouer des parties dites « longues » ?

Ne faudrait-il pas trouver une solution qui maintiendrait seulement un match en parties longues pour le championnat du monde exclusivement ?

Les forts joueurs ont démontré qu’ils excellaient dans les différentes cadences. Quel est l’intérêt de demander aux hommes et aux femmes de réfléchir longtemps afin d’essayer d’atteindre la perfection alors que l’informatique nous la propose instantanément ?

La FIDE doit réagir rapidement en proposant que la plupart des compétitions se jouent en parties rapides, tout en maintenant des parties longues, le temps que le monde des échecs s’adapte.

On pourrait imaginer un jour, les championnats de France adultes, Jeunes et par équipes ne se jouant plus qu’en parties rapides. Ceci aurait plusieurs avantages pour les participants en termes de durée, de coût ainsi que du nombre de parties jouées.

Bonne lecture et bonnes vacances à toutes et à tous.

Bachar Kouatly