Sanctions sportives confirmées en appel.

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En bref

Sébastien Feller et Arnaud Hauchard avaient fait appel de la décision du tribunal de Versailles, qui confirmait les sanctions prises par la FIDE. La Cour d'Appel les a déboutés.

Depuis  la décision de la commission d'éthique de la FIDE, Sébastien Feller et Arnaud Hauchard sont suspendus et ne peuvent participer à des compétitions homologuées par la Fédération Internationale. Les deux joueurs avaient intenté un recours devant le tribunal de Versailles, pour obtenir la suspension des sanctions disciplinaires et l'autorisation de participer aux  compétitions sportives dans l'attente de la décision du juge du fond. [Le jugement sur le fond évoqué ici fait référence à un autre volet judiciaire de cette affaire, où les sanctions décidées par la Commission d'Appel de la FFE avaient été annulées. La saisine de cette commission d'appel par le Bureau Fédéral est entachée d'irrégularité selon le jugement : en effet, seule la Commission de l'Action Disciplinaire et de l'Ethique de la FFE peut saisir cette commission, comme prévu par le règlement de la Fédération. Or c'est le Bureau Fédéral qui a saisi la Commission d'Appel].

En première instance, les deux joueurs avaient été déboutés, mais le texte de la décision était sujet à interprétation. Il y était mentionné que Sébastien Feller et Arnaud Hauchard étaient autorisés à participer aux « tournois organisés [par la FFE] ». Selon l'interprétation de la FFE, ceci signifiait que les deux joueurs pouvaient disputer les tournois organisés par la FFE, mais non homologués par la FIDE. Les joueurs quant à eux considéraient que cette décision s'appliquait à l'ensemble des compétitions organisées par la FFE, homologuées ou non.

Résumé des demandes

Les joueurs

Sébastien Feller (DR)
Arnaud Hauchard (DR)

Sébastien Feller et Arnaud Hauchard demandaient à la Cour d'Appel de :

- « dire et juger qu'il convient d'écarter l'article 4.6 du règlement de la FIDE  précisant que tout recours devant les tribunaux ordinaires est exclu et autoriser le recours au juge »

- « dire et juger que les sanctions prises récemment par la FFE, sur demande de la FIDE... doivent être suspendues jusqu'à ce que le juge du fond se prononce »

- d'autoriser l'accès des 2 joueurs aux « compétitions qui relèvent de sa compétence et, à défaut, de condamner la FFE à une astreinte de 10 000 € par infraction à cet arrêt, et lui ordonner de publier le dispositif intégral dudit arrêt sur son site fédéral. »

- « suspendre les sanctions disciplinaires de la FFE  à leur encontre dans l'attente d'une décision du juge du fond »

- « condamner la FFE à verser à M. Sébastien Feller une provision d'un montant de 10 000 € et à M. Arnaud Hauchard celle de 7 000 € à valoir sur la réparation de leurs préjudices, outre celle, pour chacun d'entre eux, de 4 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux "entiers dépens d'appel" »

La FFE

- « dire et juger que la FFE n'a pas compétence pour suspendre, reporter ou annuler la décision du 1er juillet 2012 de la FIDE. »

- « débouter par conséquent les appelants de l'ensemble de leurs demandes »

à défaut :

- « débouter intégralement les requérants [en] constatant la parfaite régularité de la procédure menée par la FIDE »

à défaut encore et en tout état de cause :

- « dans l'hypothèse où la FFE serait contrainte de laisser MM. Feller et Hauchard participer à des compétitions homologuées par la FIDE, elle violerait les statuts de la Fédération Internationale ce qui aurait pour effet de :

- faire perdre aux compétitions concernées l'homologation FIDE et porterait par conséquence préjudice à tous les participants,

- provoquer des mesures de suspension, provisoire voire définitive, de la FFE de la FIDE, ce qui, là encore, porterait un lourd préjudice à l'ensemble des licenciés de la FFE »

en tout état de cause :

- « dire et juger la procédure abusive »

- « condamner en conséquence MM. Feller et Hauchard, in solidum, à lui verser les sommes de 10 000 € à titre de provision à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices, 6 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.  »

La décision

La Cour d'Appel considère que :

- Les joueurs ne peuvent demander à ce que l'article 4-6 du règlement de la FIDE soit écarté, car ceci dépend de la FIDE et non de la FFE.

- Sébastien Feller et Arnaud Hauchard n'ont pas fait appel de la décision de la FIDE devant le Tribunal Arbitral du Sport de Lausanne, comme la possibilité leur en était donnée par les règlements de la Fédération Internationale. De plus, toute décision du T.A.S. peut être contestée devant le Tribunal Fédéral suisse. Ils ne peuvent donc pas se prévaloir des articles 6 et 13 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme (qui prévoient le « Droit à un procès équitable » et le « Droit à un recours effectif »).

- La FFE « a l'obligation de respecter les décisions prises par la FIDE [...] sous peine d'exclusion temporaire ou définitive » et qu' « elle n'a pas le pouvoir de suspendre, réformer ou annuler» les décisions de la FIDE.

- « En ayant refusé d'autoriser MM. Sébastien Feller et Arnaud Hauchard à participer en France à des compétitions homologuées par la FIDE [...] telles que le "National du Championnat de France" [...], la  FFE n'a donc pas pris de nouvelles sanctions à l'encontre de ceux-ci ou enfreint la suspension de ses propres sanctions disciplinaires décidée par [...] la Cour d'Appel mais s'est seulement conformée à la décision prise par la commission d'éthique de la FIDE

- « La demande de MM. Sébastien Feller et Arnaud Hauchard tendant à la "suspension des sanctions disciplinaires prises par la FFE" à leur encontre est sans objet, cette suspension ayant déjà été ordonnée par l'arrêt du 22 juin 2011 »

- « La demande tendant à obtenir l'autorisation de participer "aux prochaines compétitions sportives nationales et internationales" ne peuvent être accueillies que pour celles organisées par la FFE et non homologuées par la FIDE  »

- « La FFE doit être déboutée de sa demande de dommages-intérêts » au titre de procédure abusive, car la FFE n'a pas démontré que les conditions d'une procédure abusive étaient réunies.

Par ces motifs, la Cour confirme le jugement de première instance, en précisant que « MM. Sébastien Feller et Arnaud Hauchard  sont autorisés  à se présenter aux compétitions sportives organisées par la FFE et non homologuées par la FIDE »

Les juges d'appel rejettent les demandes des joueurs, ainsi que la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive de la FFE. Ils condamnent in solidum (c'est à dire que la FFE pour exiger le paiement du tout à un seul des deux joueurs) Sébastien Feller et Arnaud Hauchard à verser 3 000 € à la FFE.

Vous pouvez consulter l'intégralité de l'arrêt de la Cour d'Appel de Versailles, dont de très larges extraits sont cités ci-dessus, dans le fichier pdf ci-contre.

 

 

Conséquences

Cet arrêt clôt définitivement (sauf pourvoi en cassation) le chapitre des sanctions sportives. Sébastien Feller et Arnaud Hauchard sont interdits de toute compétition homologuée par la FIDE jusqu'au 01/05/2015 pour Sébastien Feller et jusqu'au 01/08/2015 pour Arnaud Hauchard.

Jusqu'à ces dates, ils ne peuvent participer qu'à des compétitions organisées par la FFE, et non homologuées par la FIDE. Or ce n'est pas un cas théorique !

Contrairement à ce que la logique voudrait, la FFE n'homologue pas auprès de la FIDE certains de ces tournois. Ainsi les Grand Prix FFE, une des compétitions majeures mises en avant sur le site fédéral, ne sont pas homologués auprès de la FIDE. Sébastien Feller et Arnaud Hauchard peuvent donc y participer ! Il ne faut plus s'étonner de rien dans cette affaire...

 

Concernant les (principales) autres procédures, le recours devant les juges du fond concernant l'erreur de procédure de la FFE n'aura pas de conséquences sportives. Même si les sanctions décidées par la Commission d'Appel de la FFE étaient annulées, l'arrêt de la Cour d'Appel de Versailles précise que la suspension des joueurs est une mesure prise par la FIDE et appliquée par la FFE. Il ne leur resterait que la possibilité de jouer les compétitions FFE non homologuées FIDE. Le seul intérêt de cette procédure est de savoir si l'erreur de la FFE (tel qu'il en a été jugé le 30/06/2011) va être confirmée par le tribunal, auquel cas les joueurs pourraient obtenir des dommages-intérêts.

Le volet pénal est toujours à l'instruction (La FFE a porté plainte pour escroquerie contre les joueurs).