La FFE, déboutée, attend la suite

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En bref

« Dépêche-toi de me filer des coups ». Ce texto aurait été envoyé par Arnaud Hauchard à Cyril Marzolo pour informer Sébastien Feller. La FFE qui a assigné MM Marzolo, Hauchard et Feller, ainsi que la société SFR pour obtenir les messages écrits, a été déboutée et condamnée. La Fédération rappelle cependant que le jugement sur le fond interviendra lors de l'audience de la Commission de Discipline du samedi 19 mars 2011 à 10h30, à Paris.

Soupçonné de tricherie il garde ses textos secrets

« Dépêche-toi de me filer des coups ». Voilà le contenu d'un message SMS que la vice-présidente de la Fédération française des échecs, Joanna Pomian, déclare avoir surpris lors des championnats du monde d'échecs, à Khanty-Mansyik en Russie, du 21 septembre au 3 octobre 2010.

Il aurait été envoyé par Arnaud Hauchard, Grand maître international et capitaine d'équipe, à Cyril Marzolo, Maître international, installé hors de la salle de compétition, afin de donner des indications de jeu au Grand maître international tervillois, 19 ans seulement, Sébastien Feller.

Deuxième manche ?

Elle [la FFE] se réserve le droit de saisir un juge pénal qui pourra demander la levée du secret des correspondances. « Nous renonçons toutefois à présenter ces transcriptions de SMS en commission de discipline, explique Laurent Verat, directeur général de la FFE. Il y a d'autres éléments à charge dans ce dossier. Mais en s'opposant avec autant de véhémence à ce que ces SMS soient portés à la connaissance d'un huissier, ils perdent une belle occasion de prouver leur innocence à la face du monde échiquéen. »

Actualisé le 13 mars 2011 : Source www.republicain-lorrain.fr

La Fédération Française des Echecs a assigné MM Marzolo, Hauchard et Feller, ainsi que la société SFR service clients pour se faire communiquer les messages écrits entrants et sortants, entre le 18 septembre 2010 et le 5 octobre 2010, afin d'établir la preuve de la collusion frauduleuse entre MM Marzolo, Hauchard et Feller, poursuivis depuis devant sa commission de l'action disciplinaire et de l'éthique.

MM Marzolo, Hauchard et Feller s'opposent à la demande en faisant valoir que les messages échangés entre eux sur la ligne mise à disposition de M. Marzolo sont couverts par le secret des correspondances garanti à l'article 1er de la loi du 10 juillet 1991, auquel il ne peut-être porté atteinte qu'en matière pénale ou de sécurité.

Ils forment des demandes reconventionnelles pour obtenir, sur le fondement de l'articles 700 du code de procédure civile, les sommes de 4500 € chacun pour MM Marzolo et Feller, 2000 € pour M. Hauchard.

La société SFR déclare indiquer accepter le désistement de l'instance dirigée à son encontre mais demande l'octroi d'une somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de la procédure civile.

Motif de la décision

Il s'ensuit que lorsque le titulaire d'une ligne téléphonique confère l'usage de cette ligne à un tiers, il lui est interdit ensuite de porter atteinte au secret des correspondances échangées par ce tiers par ce moyen de communication.

Par conséquent, bien que qu'il ne soit pas lui-même le souscripteur de la ligne téléphonique, M. Marzolo bénéficie du droit au secret des correspondances échangées par l'intermédiaire de cette ligne dès lors que son usage permanent lui a été confié par le titulaire de cette ligne, Mme Pomian.

Par ces motifs

Déboutons la Fédération Française des Echecs et Mme Pomian. Condamnons la Fédération Française des Echecs à payer, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure pénale.

  à M. Marzolo la somme de 2500 euros
  à M. Feller la somme de 2500 euros
  à M. Hauchard la somme de 2000 euros
  à la société SFR service client la somme de 500 euros

Lire l'article La FFE intente une action disciplinaire

Contacté par Europe-Echecs, la Fédération Française des Echecs réagit et précise que « l'ordonnance du Juge des Référés s'est uniquement prononcée sur la possibilité d'obtenir communication du contenu des sms échangés, sans s'intéresser au fond du litige. C'est en effet à la seule Commission de Discipline qu'il appartiendra de se prononcer sur la réalité des faits de triche allégués, lors de son audience du samedi 19 mars 2011 à 10h30, à Paris. »

AFFAIRE DE « TRICHE ORGANISEE »

Décision du Juge des Référés

La FFE a engagé, le 22 décembre 2010, une action disciplinaire à l'encontre de MM Sébastien FELLER, Arnaud HAUCHARD et Cyril MARZOLO, pour des faits de « triche organisée » pendant les Olympiades d'Echecs, qui se sont déroulées du 21 septembre au 3 octobre dernier à Khanty‐Mansyik (Russie).

Cette plainte a été déclarée recevable par la Commission d'Appel et d'Ethique fédérale (CADE), qui a désigné un instructeur ; le dossier est désormais entre les mains de la Commission de Discipline de la FFE. Parallèlement, lors de l'audience du 24 février 2011, le Juge des Référés de Nanterre a examiné la demande de la FFE visant à obtenir « la désignation d'un huissier » pour « transcrire les messages entrants et sortants » depuis la ligne téléphonique de M. Cyril Marzolo vers les lignes téléphoniques de MM Sébastien Feller et Arnaud Hauchard, pendant la période des Olympiades de Khanty‐Mansyik.

Cette demande de la FFE était motivée par le fait que « Mme Joanna Pomian, vice‐présidente de la fédération, [s'était] rendue compte que cette ligne téléphonique, dont elle avait laissé l'usage à M Marzolo, était utilisée par ce dernier pour communiquer par mini‐messages avec M Hauchard qui (...) apportait ainsi une assistance illicite à M Feller, lequel participait à la compétition ». Il s'agissait pour la fédération, dans le plus strict respect de la législation et de la jurisprudence régissant le secret des correspondances, d'obtenir des pièces complémentaires à verser au dossier qui sera présenté à la Commission de Discipline de la FFE.

Le Juge des Référés a considéré :
  d'une part, que « bien qu'il ne soit pas lui‐même le souscripteur de la ligne téléphonique [en question], M Marzolo bénéficie du droit au secret des correspondances échangées par l'intermédiaire de cette ligne, dès lors que son usage permanent lui a été conféré par le titulaire de cette ligne, Mme Pomian »,
  d'autre part qu'« aucune disposition légale ne [lui] conférait le pouvoir de lever ce secret », dans la mesure où il ne peut y être porté atteinte « qu'en matière pénale ou de sécurité ».
  enfin, le magistrat a jugé qu'« il serait inéquitable que MM Marzolo, Hauchard et Feller (...) supportent l'intégralité de leurs frais de procédure », et a condamné la FFE à leur en rembourser une partie.

Ainsi qu'elle l'avait annoncé par un communiqué le 27 janvier dernier, la FFE se réserve donc le droit de saisir le juge pénal, qui pourra lever le secret des correspondances. Quoiqu'il en soit et compte tenu de la décision du Juge des Référés, la FFE, qui prend acte du refus catégorique des défendeurs de voir ces pièces remises à un huissier de justice, renonce à solliciter leur communication, qui n'auraient, en toute hypothèse, qu'ajouté aux différents éléments à charge du dossier disciplinaire.

En tout état de cause, l'ordonnance du Juge des Référés s'est uniquement prononcée sur la possibilité d'obtenir communication du contenu des sms échangés, sans s'intéresser au fond du litige.

C'est en effet à la seule Commission de Discipline qu'il appartiendra de se prononcer sur la réalité des faits de triche allégués, lors de son audience du samedi 19 mars 2011 à 10h30, à Paris. La FFE tient également à souligner qu'elle avait l'obligation absolue de diligenter cette procédure, afin :
  d'une part, de dégager toute éventuelle responsabilité de Mme Pomian en tant que titulaire de la ligne téléphonique incriminée,
  d'autre part, de respecter, conformément aux engagements pris devant les autorités de tutelle, les valeurs du sport et de l'éthique, qui sont au fondement même de son existence.

Le Bureau Fédéral de la FFE

Intégralité de l'ordonnance de référé rendue le 10 mars 2011

Dans un souci de confidentialité nous avons gommé les adresses des personnes citées dans le texte ci-dessus.